Faouzia Zebdi-Ghorab

Respect de la transcendance et Intelligence historique du présent

Article

Comment déjouer l’imposture ?

L’Histoire est avant tout l’histoire des hommes et non celle des systèmes ou des partis.

La nation est d’abord un groupe d’individus ou, comme dirait plus exactement Ernest Renan, « un peuple ayant à la fois un héritage commun et une volonté de vivre ensemble ».

Il ne s’agit pas de rappeler des « banalités » ou des choses convenues mais bien de reposer les fondamentaux d’une gouvernance qui s’est transformée en organe de diktat idéologique et de répression.

Il s’agit de pointer du doigt une force politique qui s’est substituée à la volonté sociale, principale force légitime dans une démocratie car c’est par elle et pour elle que s’écrit l’histoire humaine.

Il s’agit aussi de se pencher sur la question de savoir ce qui légitime les lois en général et certaines lois en particulier.

Comment les lire et les décrypter à la lumière de notions comme le pouvoir et l’exercice du pouvoir ?

Les membres du parlement ou « représentants du peuple », de TOUT le peuple, en tant qu’ils sont élus par ce même peuple, ont, entre autres prérogatives, celui de voter des lois, de même qu’ils doivent contrôler les actions du gouvernement.

Et si les deux assemblées parlementaires et sénatoriales se prenaient d’aventure à proposer des lois contraires aux institutions et bien « les sages » seraient là pour « veiller » au respect de la Constitution.

Nous n’ouvrirons pas ici le débat de savoir selon quels critères ces dits sages sont nommés.

Disons juste que même s’ils prêtent un serment solennel et ne peuvent cumuler les mandats, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une nomination avec sa dimension toute relative. Les critères de choix d’un président, de la République, de l’assemblée ou du sénat ayant des colorations politiques différentes ou plus simplement n’ayant pas les mêmes définitions de la « sagesse » politique quand il ne s’agit pas d’une question d’humeur.

D’ailleurs, le Conseil Constitutionnel sollicité dans le cadre d’une loi, peut trancher en faveur de la constitutionnalité de celle-ci malgré sa contradiction flagrante avec des droits fondamentaux clairement établis par les différents textes fondateurs de la République.

D’où la possibilité d’en référer au Conseil Européen des Droits de l’Homme. Tout semble si bien ficelé… la machine si bien huilée…

Si tant est qu’il s’agisse vraiment de protéger les fondamentaux de la République, on observe que lorsque ces « fondamentaux » se mettent à empêcher la réalisation de desseins politiques précis, et bien rien de plus simple que de proposer, par exemple, une loi « relative à la promotion de la laïcité et à la clarification des règles de son application concrète ».

Il ne s’agit pas d’abroger la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État que nenni. Non, juste de la réexpliquer !
Pourquoi aurait-elle besoin d’être réexpliquée aujourd’hui ? Pourquoi celle-ci en particulier ?

Toute la question est là.

Toute personne qui se bat pour une cause, se bat pour les autres.

Beaucoup ont arrêté de se battre tout court pendant que d’autres œuvrent, et avec quelle application !, à éclater le ciment de la Nation en excluant du fonctionnariat de l’Etat une frange in-désirée de la Nation, en proposant notamment que : Toute manifestation d’une appartenance religieuse par une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, dans l’exercice de ses fonctions, est interdite. (Titre III, Article 21)
Tout hôpital public est tenu d’assurer la continuité du service public, notamment l’activité d’interruption volontaire de grossesse, et d’en assurer le fonctionnement effectif et régulier. Ces éléments doivent figurer dans les documents d’accréditation de l’établissement. (Titre III, Article 21)

Lorsque la gauche était au pouvoir, ce type de lois « restrictions explicatives » était, va-t-on dire, le fait de l’opposition, donc de la droite.

Maintenant que la droite est majoritaire, c’est à la gauche de jouer son jeu de l’opposition.

Et dans une valse incessante entre jeu du monopole, tentative de dépossession, dépossession, monopole, on assiste à une lutte des partis, même si cela doit se faire au détriment des intérêts de ceux qui ont participé par leur voix à leur promotion.

Et à ce jeu, l’élection, l’instrument de l’expression populaire, s’est transformée en appareil du gouvernement et des partis.

Non seulement, le parlement ne légifère plus pour la société civile dont il est sensé prolonger la voix, mais il va même légiférer aujourd’hui contre la volonté populaire.

A croire que les partis ont un système de fonctionnement identique à celui des partis uniques au sens où une lutte de pouvoir doit les opposer coûte que coûte afin de destituer le pouvoir en place et devenir en quelque sorte parti unique décisionnaire et force de proposition qui s’impose de facto.

A crise plus financière qu’économique et à crise de gouvernance, planche à billets et boite à « idées » deviennent les solutions à tous les maux.

Par cette proposition de loi 406 émanant de deux sénateurs, c’est aujourd’hui le front de gauche qui agite la boite à idées.

La volonté populaire, l’intérêt social, la sauvegarde du « vivre ensemble » sont détournés au profit d’une caste qui usurpe les voix pour les retourner contre ceux là même qui ont pensé que ces représentants parlementaires étaient le prolongement de l’intérêt de leurs volontés individuelles.

La société civile qui, par tous les moyens, essaie de préserver la cohésion, nage à contre courant d’une classe politique qui agit en disharmonie, en désaccord, qui contredit même la volonté affirmée d’une société qui vit ensemble dans sa diversité, en essayant de dépasser tant bien que mal les différentes épreuves et crises dont elle est la première et unique victime.

Une société qui vit ensemble, avec ses plaies, ses blessures, par delà ses conflits mêmes qu’elle essaie de transcender par l’amitié et la solidarité et qu’une élite « emmerde » à coups de relecture et de propositions de lois …

Vous avez, chers élus, abandonné une frange de la population, la laissant livrée à elle-même : alors, ayez au moins la décence de lui ficher la paix afin qu’elle se dépêtre en toute « quiétude » de la situation où l’a plongé un système politique sous tendu par l’idéologie capitaliste libérale du « tout profit » à n’importe quel prix.

Et le fossé est devenu gouffre entre les populations et leurs élites qui ne manquent dans une mégalomanie politique de récupérer même les révolutions pour lesquelles le sang et la désolation furent le prix à payer.

Et surtout, ne vous encombrez pas de parodies d’enquêtes et commissions pour rationnaliser, donner une dimension d’objectivité et faire avaliser vos proposition. Nous vous en faisons désormais cadeau par souci d’économie d’argent de temps et de ras le bol d’être pris pour les crétins d’une telle mascarade.
« La formation à la laïcité constitue l’un des objectifs fondamentaux de l’éducation nationale »dites vous dans l’article L. 312-19.

Quant on connaît un temps soit peu l’état de l’institution scolaire, une telle phrase prend une résonnance encore plus particulière d’autant que l’on sait que même le savoir que l’on peut considérer comme un droit naturel, beaucoup en sont désormais privés.
Les développements scientifiques aussi sont un acquis de l’humanité et pourtant une grande partie de l’humanité en est encore privée.

Formation à la laïcité comme objectif majeur, quant on sait que même l’éducation affective, base de toute éducation aux valeurs familiales, est parfois absente de certains foyers.

Formation à la laïcité comme objectif majeur, quant on sait que l’éducation sociale posant les principes du vivre ensemble serein est mise à mal aujourd’hui par ceux là même qui crient au danger alors que de leurs mains ils creusent la fracture sociale mettant en péril la notion de communauté de destin.

Formation à la laïcité comme objectif majeur, quant on sait que l’éducation scolaire n’a plus les moyens ou plutôt la volonté de ses ambitions.

Aussi a- t-on envie de crier dans une énième et dernière tentative « Allô Mars ? Ici la Terre ! Nous entendez vous ? »

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